Institut supérieur du tourisme, de l'hôtellerie et de l'alimentation

L'outil ACCTT : Une réflexion autour du changement climatique et du tourisme

Un outil d’aide à la décision : Minimiser les risques, vers un tourisme vecteur de développement

L’outil d’aide à la décision.

Que voulons-nous évaluer ?
- L’outil d’aide à la décision ici développé vise à évaluer la capacité du projet touristique à être vecteur de développement dans le processus de construction d’un projet touristique, et non la réalisation du projet lui-même. Cette capacité sera interrogée par le rapport entre les principes d’un tourisme vecteur de développement et le phénomène du changement climatique.
- L’outil d’aide à la décision vise à évaluer la relation entre le projet touristique interrogé et le changement climatique, au sein d’un processus de construction d’un projet touristique. Le but de cette analyse est d’apprécier la prise en compte du risque climatique lié au projet. Pour cela, trois grandes caractéristiques du projet ont été sélectionnées : la dépendance du projet aux conditions climatiques, la capacité d’adaptation au phénomène et d’atténuation de sa contribution, et enfin le niveau de connaissance/conscience sur le sujet et l’intégration de la thématique « climat » au sein de la construction du projet.

Les principes de l’outil.

Ces principes correspondent à « des dispositifs nécessaires à la mise en place du processus, pour que le tourisme puisse être vecteur de développement. » L’activité touristique pour être facteur de développement doit :

- vérifier simultanément 4 fondements qui sont pour les clients : la mobilisation du temps libre ; des moyens en particulier financier, de la liberté de se déplacer et pour le territoire de la liberté d’accueillir

- mobiliser 5 principes qui s’articulent et se graduent pour chaque projet. Il s’agit des principes climatique, durée de séjour, fidélisation, mise en œuvre de service et relation entre activité principale/activité complémentaire.

Ces principes une fois les fondements acquis, correspondent à des variables, permettent d’apprécier le processus d’un projet, et sa capacité de l’activité touristique à générer un développement territorial.

Il ne s’agit pas au travers de l’outil de juger ou de modéliser un projet mais bien d’apprécier le processus de construction d’un projet au regard des 4 fondements et des 5 principes identifiées, relatifs à l’évaluation d’une activité touristique comme facteur de développement territorial.

Les mécanismes d’un tourisme, vecteur de développement. Les apports d’une approche historique.

L’activité touristique est avant tout un déplacement de personnes de leur espace quotidien vers un espace inhabituel pour un temps donné. Ce déplacement devient touristique lorsqu’il répond simultanément à quatre fondements que sont le temps libre, les moyens financiers, la liberté, de se déplacer et la liberté pour les populations locales de les accueillir (Torrente 2008).

Partant de là, nous pouvons estimer que l’activité touristique a connu a connu ses premiers mouvements à la fin du 18e, début du 19e (Boyer, 2007). A cette époque, quelques aristocrates et bourgeois des classes aisées, voiremoyennes sont venus, tels des élites, des privilégiés séjourner l’été en montagne et l’hiver en bord de mer. Si nous tentons de comprendre la structuration de cette activité à cette époque, cinq principes se dégagent :



Avec la démocratisation du tourisme, c’est-à-dire l’accès aux vacances pour tous à partir des années 1960 et grâce à la mise en place des congés payés en 1936, de nombreux touristes ont eu aussi la possibilité de « prendre des vacances ». Leur destination a été celle « où ils savaient qu’ils pouvaient aller », c’est-à-dire la famille ou les amis et là où les élites, les privilégiés ont installé une activité touristique (Torrente, 2008).

Ici, nous pouvons mettre en évidence le cycle touristique suivant : une « élite » crée une destination et la « masse » ensuite les rejoints, ce qui a tendance à chaque fois à faire fuir l’élite qui invente de nouvelles destinations. Sans doute ce cycle trouve son sens dans la place du tourisme comme marqueur social de nos sociétés industrielles.



C’est à partir de ce cycle que peu à peu le tourisme estival balnéaire et hivernal en montagne s’est développé.

C’est aussi à ce moment-là que l’agriculture française a connu des difficultés et la montée en puissance de l’activité touristique a souvent accéléré sa quasi disparition. C’est à cette période qu’une rupture apparait dans le processus touristique car les cinq principes identifiés dans la première phase vont se caractériser de la façon suivante :



Cette inversion des principes a pour conséquence de transformer l’activité touristique en une activité principale ou le risque climatique notamment, est très élevé alors qu’il en représente quasiment la « matière première » et ou l’inversion du principe de service suppose désormais que les sites accueillent toujours plus de monde pour contrer le phénomène que connaissent beaucoup de destinations touristiques à savoir : l’augmentation du nombre de touristes entraine une baisse de la qualité des prestations qui se traduit par une baisse des prix qui suppose une nouvelle augmentation du nombre de visiteurs et ainsi de suite entrainant parfois la sur fréquentation.

Cette situation brièvement décrite a eu pour conséquence de penser le développement des territoires souvent à partir de l’activité économique pressentie comme dominante à savoir le tourisme.

Si nous reprenons cette analyse, nous pouvons aller un peu plus loin dans l’exploitation de ces principes. Dans la perspective de minimiser les risques d’un projet touristique pour le développement d’un territoire, ces 5 principes sont des leviers pour la mise en œuvre de l’activité touristique. Mais ils ne peuvent être envisagés tous de la même façon. Si les principes 4 et 5 sont toujours maitrisables aujourd’hui, les facteurs 2 et 3 ne peuvent être qu’ajustés. Quant au principe climatique, il peut s’agir d’une variable ajustable, ou modulable, c’est un SUPRA PRINCIPE.

L’utilisation d’une activité touristique comme vecteur de développement durable sur un territoire, correspondrait alors à la recherche d’une meilleure plus value de cette activité. La minimisation du SUPRA PRINCIPE devenant indispensable, les évolutions du climat peuvent apparaitre alors comme une réelle opportunité pour le tourisme durable.

Le parti pris choisi est d’affirmer que le changement climatique n’est pas un risque en tant que tel pour une activité touristique, mais que c’est la CONDITION climatique, la ressource climat (et non le changement), qui engendre un risque ou non, selon la place qu’elle occupe dans le processus de développement par le tourisme.

Explications des principes

Principe 1 - Le climat :

Cela correspond à la place qu’occupe le climat dans le processus de réalisation de l’activité/Produit touristique sur le territoire. Plus le processus de mise en œuvre du projet touristique est dépendant du climat, plus la place du tourisme comme vecteur de développement est diminué, fragilisé, questionné.

Il s’agit d’évaluer comment ce SUPRA-PRINCIPE qui n’est absolument pas prévisible et maitrisable par l’homme est utilisé dans la structuration de l’activité touristique sur un territoire. Lorsque nous prenons notre période de référence, l’activité touristique était directement liée à la situation climatique mais avec un déplacement sur le littoral l’hiver et en montagne l’été. Aujourd’hui de par la démocratisation de l’activité touristique et la recherche de qualité pour répondre aux attentes du client dans un secteur très concurrentiel, la prise en compte du climat est devenue l’élément majeur de la structuration de cette activité.

Principe 2 - La durée du séjour :
La durée que passe le touriste sur le territoire. (Cela interroge notamment la notion de court séjour ou de circuit). Plus la durée du séjour est longue, plus l’échange et le développement social est favorisé. Plus la durée « continue » du séjour par touriste sur un territoire donné est longue, plus le tourisme peut être considéré vecteur de développement (Notamment dans son rôle social par l’échange et la rencontre de l’autre). Plus la durée du séjour est courte, plus la place du tourisme vecteur de développement doit être minimisée.
Ce principe peut être utilisé pour diminuer le risque climatique. En effet plus la durée du séjour est longue, moins une situation climatique défavorable aura de conséquences sur la qualité de l’activité touristique (1 journée de pluie sur 20 jours est moins problématique que 1 journée de pluie sur 2 jours).

Principe 3 - La fidélisation du touriste :
Elle relève du comportement du touriste, et de la capacité du territoire à la susciter, la générer, l'orienter et correspond au fait de revenir, à plusieurs reprises et de façon régulière, sur le territoire d’accueil. (La fidélisation et la durée du séjour sont deux principes qui peuvent être connectés). Souvent, la sur-fréquentation réduit les situations de fidélisation. Plus la fidélisation au territoire est forte, plus le tourisme peut être vecteur de développement. Il en est de même pour ce principe que pour ce qui est de sa relation au climat. Plus un touriste est fidèle moins l’impact d’une période de climat défavorable sur son comportement sera importante.

Principe 4 - La présence de services :
Tout d’abord, nous entendons par service sur un territoire l’ensemble des services publics (transports, information, santé,..) et des services marchands tels que les répertorie l’INSEE.

Il s’agit ici de l’effet multiplicateur entre le nombre de touristes présents simultanément sur un territoire et la présence et la qualité de services. A l’origine, lorsque le tourisme s’adressait seulement à une élite, peu de touristes générés beaucoup de services alors que depuis le développement du tourisme de masse, beaucoup de touristes génèrent en valeur relative peu de services. C’est cette dernière situation qui est à l’origine de la logique quantitative de développement de l’activité touristique sur les territoires. En effet un nombre important de touristes, entrainent souvent une dégradation de la qualité du service, qui entraine en suivant une baisse proportionnelle des prix qui souvent, pour maintenir leur chiffre d’affaires, obligent les acteurs a augmenter la fréquentation touristique. C’est ce mécanisme qui est à l’origine de la sur fréquentation de nombreux sites touristiques et des effets indésirables de l’activité touristique dans un processus de développement.

Principe 5 - La place de l’activité touristique : Complémentarité.
Au cours de notre période de référence évoquée dans notre approche historique, le tourisme s’est développé comme une activité complémentaire à côté d’une activité principale qui était souvent l’agriculture.

Depuis le développement du tourisme de masse et les difficultés grandissantes du secteur agricole, petit à petit l’activité touristique s’est imposée souvent comme une activité principale. C’est souvent cette situation qui est à l’origine des difficultés des territoires et qui a entrainé une augmentation importante du risque climatique dans le processus de développement.

Il s’agit de mesurer la part de l’activité touristique dans l’ensemble de l’activité économique et d’en comprendre les effets directs et indirects Enfin, au travers de ce principe nous pouvons évaluer le niveau de spécialisation d’un territoire par rapport à l’activité touristique. Il semble que plus une activité touristique est complémentaire des autres secteurs d’activités et prend appui dessus plus nous pouvons dire que cette activité est facteur de développement. A l’inverse, une activité touristique organisée comme une mono activité sur un territoire risque de le fragiliser et entrainer des déséquilibres. Nous voyons dans ce processus que penser le tourisme comme une activité complémentaire permet également de minimiser le risque climatique alors même que nous pouvons avoir une activité fortement dépendante de celui-ci (c’est le cas de l’activité ski).

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